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n°74

La place du travail dans la vie des jeunes

retour au n°74 "Les 18-25 ans : une catégorie qui pose question"


Auteur(s) :

Patricia VENDRAMIN Directrice de recherches à la Fondation Travail-Université Professeur à l’Université Catholique de Louvain


Résumé :

Il y a beaucoup d’hypothèses autour du rapport qu’entretiennent les jeunes avec le travail. Les analyses suggèrent tantôt un engagement soutenu et des attentes subjectives fortes en lien avec le travail, d’autres travaux évoquent une démotivation et un engagement limité. Les recherches montrent que, en dépit de conditions d’entrée dans l’emploi peu favorables, le travail demeure une valeur importante pour les jeunes, même si elle n’est plus la seule valeur à la base de la construction identitaire.


Mots-clés :

Jeunes, travail, valeurs, identité


Extrait :

(...) Qu’attend-t-on au juste du travail ? Qu’en attendent les jeunes salariés en particulier ? La littérature distingue généralement deux ou trois dimensions qui constituent la relation au travail. Les termes employés sont parfois différents, mais la signification est plutôt similaire*. La première dimension est appelée instrumentale, elle fait référence aux attentes « matérielles » par rapport au travail : le salaire, la sécurité, les possibilités de promotion. La seconde dimension est sociale, elle concerne l’importance des relations humaines au travail. La troisième dimension est appelée symbolique et concerne les possibilités de développement personnel, la capacité de s’épanouir et de s’exprimer dans son activité, l’intérêt pour le contenu du travail, le sentiment de réussite, le niveau d’autonomie et l’utilité sociale. Certains auteurs regroupent les dimensions sociale et symbolique en une seule dimension appelée expressive**.

Une recherche européenne réalisée entre 2006 et 2008 (SPREW)*** confirme d’une part, l’importance des dimensions expressives et sociales dans l’ensemble des classes d’âge. Elle atteste, en effet, que le travail est investi d’attentes multiples mais non exclusives : les différentes dimensions du travail ne se substituent pas l’une à l’autre, la croissance des attentes intrinsèques (expressives) n’évacue pas les attentes extrinsèques (instrumentales). L’approche qualitative confirme l’importance de la composante instrumentale, mais elle souligne également sa complexité. Le rapport au salaire est aussi investi d’une valeur symbolique : le salaire est aussi la mesure de la valeur d’une personne, un signe objectif de reconnaissance et d’estime, un signe d’émancipation. Cet aspect est particulièrement développé par les jeunes. Cette recherche montre également la différenciation des attentes expressives à l’égard du travail : certains partagent des attentes plutôt individuelles (autonomie, responsabilisation), d’autres des attentes plus collectives ou altruistes (être reconnu, faire un travail utile). La dimension relationnelle du travail est également apparue comme fondamentale, particulièrement pour la jeune génération. Néanmoins, ce rapport au groupe et au collec- tif prend des formes différentes. Plus que d’appartenir à un groupe social ayant une certaine résonance sociétale, ce qui semble important, c’est le besoin de faire partie d’un petit réseau de personnes qui se rencontrent tous les jours, ou au moins régulièrement.

L’enquête réalisée auprès des jeunes salariés en Belgique francophone, mentionnée plus haut, suggère un nouvel équilibre entre les dimensions expressive et instrumentale du travail. Ce qui a changé, ce n’est pas tant la triple ou double référence au travail, mais plutôt le poids respectif de chacune de ces dimensions. (...)

* PAUGAM S., Le salarié de la précarité, Paris, Puf, 2000 ; NICOLE- DRANCOURT C., ROULLEAU-BERGER L., Les jeunes et le travail. 1950-2000, Paris, Puf, 2001 ; RIFFAULT H., TCHERNIA J.-F., « Sens du travail et valeurs économiques », dans Bréchon P. (dir.), Les valeurs des français, Paris, armand Colin, 2003, pp. 108-129.

** HABERMAS J., Théorie de l’agir communicationnel, Paris, Fayard, 1987 ; ZOLL R. (1992), Nouvel individualisme et solidarité quotidienne, Paris, Kimé, 1992 ; ZOLL r., « Jeunes, sens du travail et nouvel individualisme en allemagne », dans ROULLEAU-BERGER L., GAUTHIER M., Les jeunes et l’emploi dans les villes d’europe et d’amérique du nord, éditions de l’aube, La tour d’aigues, 2001, pp. 261-272.

*** Menée dans le cadre d’un programme européen, financée par le 6ème PCrD et coordonnée par La Fondation Travail-Université de namur, la recherche, intitulée Social pattern of relations to work (SPreW), avait pour ambition d’apporter quelques éclairages sur la question des différences dans le rapport au travail des générations en europe et sur les éléments susceptibles de contribuer à les expliquer. Elle s’est étendue sur deux ans et a impliqué des chercheurs dans six pays : l’allemagne, la Belgique, la France, la Hongrie, l’italie et le Portugal. Elle s’est appuyée sur des revues de littérature nationales, des exploitations secondaires d’enquêtes nationales, des exploitations d’enquêtes internationales et des entretiens approfondis, individuels et de groupe, menés dans chacun des pays. www.ftu-namur.org/sprew

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