n° 83 - 2015
Intervenir dans le "chez soi"
L’intervention psycho-médico-sociale à domicile se réfère à une palette de plus en plus variée de métiers et de services. En dépit de cette hétérogénéité, les professionnels se rejoignent largement sur la plus-value que représente l’intervention sur le lieu de vie des personnes, sur la flexibilité et les stratégies d’intervention qu’elle exige, et sur les difficultés et inconforts auxquels ils peuvent y être confrontés…
Éditorial
Nous sommes entrés dans l’ère du "domicile", du "chez soi" valeur refuge au sens propre comme figuré. De nouveaux services ont été créés, d’autres ont renforcé cet axe d’action. Cette tendance répond au souhait des personnes de rester chez elles, à la volonté de préserver la cellule familiale, de respecter les libertés et de soutenir les capacités de chacun à mener sa vie. Mais il répond par ailleurs à des considérations économiques (restrictions budgétaires, manque de places dans les institutions, création d’emplois), et surfe aussi sur les courants dominants qui modulent aujourd’hui les politiques et imprègnent les mentalités comme l’individualisme, l’autonomie, la responsabilisation.
Loin de désigner une réalité homogène, l’intervention à domicile renvoie à une large variété de professionnels (aides ménagères ou familiales, éducateurs, assistants sociaux, psychologues, infirmiers, ergothérapeutes…), qui se distinguent notamment par ce qu’ils font (accompagnement-soutien, éducation, rééducation, soins physiques ou psychiques, enquête…), par le cadre de leur intervention (sollicitation ou aide contrainte, contrôle…) et par la fréquence et la durée de leurs visites. Difficile dès lors de faire un dossier qui prend en compte toutes les réalités, et nous avons dû renoncer à toutes les explorer.
Il reste que le domicile est un territoire particulier de l’action psycho-médico-sociale. Que le professionnel soit le bienvenu ou non, il pénètre dans un espace qui n’est pas le sien, lieu de vie et d’intimité d’un autre. L’asymétrie traditionnelle qui caractérise sa relation avec celui-ci, le bénéficiaire, est, sinon inversée, à tout le moins questionnée. Chaque maison est différente, chaque personne a sa personnalité et affirme à sa manière ses repères dans son repaire. Chaque intervention est une immersion et révèle de vastes fragments de vie des personnes, de leurs conditions de vie, de leurs habitudes, de leurs vicissitudes, de leurs relations intrafamiliales, de leur réseau. Le professionnel doit pouvoir décoder tout cela et s’adapter en permanence. Par exemple, être tantôt discret, tantôt observateur, tantôt spectateur, tantôt contrôleur... Et s’interroger : que doit-il voir ? doit-il tout voir ? que peut-il ne pas voir ?... Parfois il lui faudra adopter une position basse, parfois réaffirmer un cadre fort qui mettra plus à distance le quotidien et en même temps le protégera, car le domicile est aussi proximité et le professionnel y est souvent seul.
La proximité, justement, est ce qui fait du domicile son intérêt et son attrait. Les professionnels qui travaillent chez les personnes apprécient ce terrain qui efface la distance protocolaire, bureaucratique, et rend les rencontres plus authentiques.
Mais le basculement actuel en faveur du domicile ne doit pas nous faire perdre de vue que les institutions, souvent décriées ces dernières décennies, continuent à jouer un rôle essentiel dans l’accueil de publics en grandes difficultés et en grande dépendance. Des professionnels au sein de ces institutions réfléchissent aujourd’hui aux moyens d’offrir à leurs résidents une réelle intimité et de leur permettre de se (re)créer un véritable « chez soi ». Dans ce dossier, nous avons dès lors aussi souhaité accorder une place au travail psycho-médico-social mené au sein de ces lieux de vie…
Sommaire
– L’équipe comme soutien en service à domicile - Carine MARAQUIN
– Pour une meilleure prévention des risques professionnels dans l’aide à domicile - Agnès VAN DAELE
HORS DOSSIER (rubrique COUP D’OEIL) :
– Les femmes ont-elles le droit d’avoir des droits ? - Christine BODARWE
– Harcèlement des chiffres et santé publique - Bernard LEMAL
– La politique d’insertion socio-professionnelle des CPAS wallons - Colette LECLERCQ
– Regard sur la santé des jeunes. La sexualité des jeunes en Hainaut - Sonja GALIC
– Déconstruire les stéréotypes autour de l’incapacité de travail & l’invalidité - Colette LECLERCQ
- 4 numéros qui se suivent
- Prix préférentiel au numéro
- Frais d’envoi gratuits !
- n°120 | Faire place à l’usager
- n°119 | L’intégration, l’affaire de tous
- n°118 | L’indispensable collectif
- n°117 | Où va le métier d’éducateur ?
- n°116 | Devenir parent. Quand tout n’est pas rose
- n°115 | Jeunes "incasables" - Comment mieux travailler ensemble ?
- n°114 | Nouveaux visages de la précarité & inégalités grandissantes
- n°113 | Quel accès à l’emploi pour les publics plus fragiles ?
- n°112 | Quand il y a urgence
- n°111 | L’usager au centre des réseaux
EN LIEN AVEC CE NUMÉRO
titre
A la prison de Saint-Hubert. Le jardinage et la ferme comme outils de réinsertion
retour au sommaire du n°90 "Jardinons le social, cultivons un autre monde" Acheter le pdf Auteur(s) : Interview par Romain Lecomte de Véronique VAN DER AVOORT, Conseiller-Directeur, Chef d’établissement FF Brigitte LOOP, Attachée-Directrice FF Cécile DETHIER, Coordinatrice du SAD (…)